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L’affaire de Nie Shubin, âgé de 20 ans lors de son passage devant un peloton d’exécution en 1995, est la dernière retentissante erreur judiciaire reconnue en Chine.
"La Cour populaire suprême estime que les faits invoqués lors du procès initial étaient incertains et les preuves insuffisantes, et modifie ainsi le verdict initial en déclarant l’innocence" de Nie Shubin, a annoncé la Cour suprême dans un communiqué sur son compte officiel d’un réseau social.
Le taux de condamnation des tribunaux chinois est officiellement de 99,92%, et les risques d’erreurs judiciaires sont alimentés par les aveux parfois extorqués par la police.
La Chine est considérée comme le pays réalisant le plus d’exécutions. Celles-ci sont estimées à plusieurs centaines par an, mais leur nombre exact reste un secret d’Etat.
Nie Shubin avait été condamné pour le viol et le meurtre d’une femme, dont le corps avait été retrouvé dans un champ de maïs près de la ville de Shijiazhuang (nord).
A l’époque, l’heure du crime, le mode opératoire et les motivations du meurtrier n’avaient pu être établis, et d’importants documents relatifs aux témoins et à la déposition de l’accusé étaient manquants, a reconnu la cour suprême.
"Des doutes subsistent sur la véracité et la légalité des aveux" de Nie, a-t-elle souligné.
Sa famille demandait justice depuis l’arrestation en 2005 d’un tueur de série qui avait avoué le meurtre. L’affaire n’a été rouverte officiellement qu’en 2014.
La Haute cour du Hebei, qui avait condamné et exécuté Nie "a exprimé ses plus profondes excuses" à ses proches et va enquêter prochainement sur "d’éventuels problèmes d’illégalité relatifs au procès", selon CCTV.
Pour Liu Fujin, avocat de la défense, la justice a fait traîner le réexamen de l’affaire car personne ne souhaitait endosser la responsabilité d’une erreur judiciaire.
"Chaque province et chaque région a de vieilles affaires comme celle de M. Nie, et d’autres qui sortent et sont toujours dissimulées", assure-t-il, notant cependant que le système judiciaire a été amélioré depuis les années 90.
Fin 2014, un tribunal de Mongolie intérieure (nord) avait déjà prononcé un retentissant acquittement d’un adolescent exécuté à tort 18 ans auparavant pour viol et meurtre. L’innocence de Hugjiltu avait été déclarée neuf ans après qu’un autre homme ait avoué le meurtre en 2005.
"De nombreuses graves failles existent dans l’application par la Chine de la peine de mort, et l’unique moyen pour eux de garantir que ce type d’affaire tragique ne se reproduise pas est de l’abolir", a réagi William Nee, spécialiste de la Chine à l’ONG Amnesty International.