Le parquet a requis 1 an de prison avec sursis, 2 millions de francs d’amende et 1 an d’inéligibilité contre l’ancien président du Pays, ce mardi, dans l’affaire des contrats-cabinet douteux du ministère de la Jeunesse et des Sports et du ministère de l’Agriculture. Une peine identique a été soumise à l’appréciation du tribunal concernant Fernand Roomataaroa, ministre de l’Agriculture à l’époque. Clarenntz Vernaudon, ministre de la Jeunesse et Sport, encoure quant à lui 6 mois de prison avec sursis et 500 000 francs d’amende si la juridiction venait à suivre scrupuleusement les préconisations du parquet. Le tribunal devrait mettre sa décision en délibéré, le jugement ne devrait pas être connu avant plusieurs semaines.
Sureffectif et emplois fictifs estime le Pays, partie civile
La justice reproche aux trois hommes les conséquences d’"un contrat politique" passé à l’époque, en 2008, et destiné à préserver la très fragile majorité du gouvernement Tong Sang. Menacé par une motion de défiance en cette période de grande instabilité qui aura vu défiler quatre gouvernements en deux ans, Gaston Tong Sang avait accepté de céder aux pressions du représentant Ai’a Api Fernand Roomataaroa qui menaçait de quitter la majorité s’il n’obtenait pas le ministère de l’Agriculture de Haamoetini Lagarde. Cette dernière avait accepté le deal sans trop faire de vagues mais en posant ses conditions : une reconversion comme conseillère du président et le reclassement de la vingtaine de membres de son cabinet.
Ces derniers avaient finalement été ventilés entre les ministères de la Jeunesse et des Sports et de l’Agriculture, affectés pour neuf d’entre eux à des missions sans objet avec leurs qualifications. Des plantons, chauffeurs ou secrétaires ne sachant parfois même pas se servir d’un ordinateur avaient ainsi été signés "contrats-cabinet" pour ces ministères, des postes éminemment plus techniques sur le papier que les compétences proposées. L’un de ces contrats-cabinet gérait une garderie à Mahina pendant ses horaires de travail.
L’affaire avait vu le jour après les révélations à la presse d’un Fernand Roomataaroa revanchard suite à son évincement du Ai’a Api. Des courriers de dénonciations étayés avaient ensuite atterris sur le bureau du procureur de la République, provoquant l’ouverture d’une enquête.
Gaston Tong Sang et ses ministres ayant activement pris part aux manœuvres politiques ayant abouti à cette situation, ne pouvaient l’ignorer a répété l’accusation. Pour sa défense, l’ancien président du Pays a toujours réfuté les accusations d’emplois fictifs, évoquant plus sobrement une situation ponctuelle de sureffectif dans ces ministères.
Pour Me Mestre, l’avocat représentant les intérêts de la Polynésie française, partie civile dans ce dossier, ce procès est une sorte de voyage en arrière où cette façon de faire était érigée "en mode de fonctionnement" par les gouvernements de l’époque. Rémunérés entre 180 000 francs et 700 000 francs mensuels, ces contrats financés sur fonds publics auraient coûté 43 millions de francs à la collectivité selon lui. L’avocat a aussi réclamé 10 millions de francs au titre du préjudice moral pour le déficit d’image provoqué par cette affaire au détriment du pays. Le procureur de la république a pour sa part fustigé des "accords politiques de bas étages à des fins d’intérêts personnels et sans utilité pour la Polynésie française".