http://www.tahiti-infos.com/La-vie-coute-39-plus-cher-en-Polynesie-qu-en-metropole_a150324.html
On le dit souvent, la vie est chère en Polynésie, mais il est souvent difficile de quantifier ce sentiment. Un document publié par l’Institut de la statistique de la Polynésie française vendredi dernier aide cependant à mettre des chiffres sur le coût de la vie.
La conclusion du travail de l’institut c’est qu’en Polynésie la vie est 38,5% plus chère qu’en Métropole. En 2010, l’écart n’était que de 25,9%. Mais comme les métropolitains et les Polynésiens ne consomment pas la même chose, ces chiffres ne sont qu’une moyenne.
Ainsi, les produits habituels de métropole sont bien plus chers au fenua, et un français venant s’installer en Polynésie mais gardant ses mêmes habitudes de consommation verrait son coût de la vie exploser de 55% (contre 51% en 2010) ! À moins de cher à faire des économies, les "métros" doivent vite s’habituer à acheter leurs yaourts au prix du fret aérien et à payer leur connexion internet deux fois plus chère (pour un service difficilement comparable, selon l’ISPF). S’ils allaient plutôt s’installer en Martinique, ils ne devraient augmenter leur budget que de 17% pour vivre comme chez eux.
Par comparaison, un ménage tahitien qui s’installe en métropole mais qui vivrait là-bas exactement comme à Tahiti n’y ferait des économies que de 19% (seulement 5% en 2010). Mais on imagine qu’il s’habituera rapidement au bon vin à moins de 6 euros (720 Fcfp) et au fromage à quelques euros…
LA NOURRITURE TIRE LA DIFFÉRENCE DE PRIX
Ce qui conduit à ces différences n’est pas uniquement la différence de prix entre les produits, mais aussi la structure des habitudes de consommation. En Polynésie, c’est 25% du budget des ménages qui est consacré à l’alimentation (15% en métropole). Or, les produits alimentaires consommés par les Tahitiens ne sont pas beaucoup moins chers en métropole : -18% en moyenne. Notre ménage parti s’installer dans l’hexagone ferait de grosses économies sur les alcools, les télécoms et les services, par contre les prix seraient sensiblement les mêmes qu’à Tahiti pour la santé, l’éducation, les transports ou les vêtements.
En métropole, les ménages ne consacrent que 15% de leur budget à s’alimenter, mais doivent prévoir plus pour leur santé : les remboursements sont moins importants et il y a plus de médecins non conventionnés. Du coup notre ménage de farani venu découvrir le Pacifique ne paierait que 18% de plus pour sa santé.
C’est pour équilibrer ces différences de consommation que l’ISPF utilise un indice croisant ces deux profils (le "métro" à Tahiti et le Polynésien dans l’hexagone) nommé "indice de Fisher". Selon cet indice, la différence de prix atteint 38,5% entre la Polynésie et la métropole. En équilibrant les habitudes de consommation, il apparait que les plus grosses différences dans le budget global d’un ménage porteront sur les biens et services divers (qui augmenteront le budget global du ménage de 9 points), suivis par l’alimentaire (7 points), le logement (5 points), l’alcool et le tabac (4 points) puis la communication et les loisirs (à 3 points chacun).
POUR UN TOURISTE, C’EST BIEN PIRE
Maintenant imaginons un simple visiteur, qui n’aura pas à se préoccuper du coût de l’éducation, de la santé, du logement ou des meubles… C’est en hôtels, billets d’avion et nourriture qu’il dépensera son argent. Et là, il aura vraiment l’impression que tout est deux fois plus cher en Polynésie. Les boissons non alcoolisées et la nourriture vont coûter 81% de plus à notre touriste venant de métropole. L’alcool va le faire tiquer : la différence de prix est de 142%. Hôtels, cafés et restaurants sont 58% plus chers…
C’est d’ailleurs aussi ce qui renforce la sensation de vie chère en Polynésie. Quand on compare nos prix à ceux de la métropole, personne ne pense à comparer le prix de l’éducation (identique) ou celui de la santé. C’est le caddie des courses qui fait l’opinion, et il fait mal (voir encadré).
Et même pour les Polynésiens, l’impression que tout augmente, alors même que l’inflation est négative depuis deux ans, n’est pas une illusion : "l’évolution de l’indice ouvrier en Polynésie française montre que le renforcement de la vie chère pour les ménages à bas revenus est réel. Contrairement à l’indice général qui baisse, l’indice ouvrier progresse, essentiellement en lien avec la hausse des prix des produits alimentaires et des boissons non alcoolisées."
Les prix de la nourriture augmentent dans le monde entier, et en Polynésie les taxes sur le sucre, le tabac et l’alcool de ces dernières années ont encore plus augmenté le coût de ces produits. Or, ce sont les ménages les plus pauvres qui ressentent le plus ces augmentations de prix : "plus les revenus d’un ménage augmentent, plus la part de leur dépense en alimentation diminue (25 % en moyenne, 30 % pour un ménage dont le chef de ménage est ouvrier). Ainsi la perception de la vie chère est plus forte chez les ménages à plus bas revenus." Donc non seulement la vie devient plus chère pour les pauvres, mais comme ce sont leurs courses qui augmentent, ils le ressentent d’autant plus douloureusement.