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Après quatre jours d’échanges, les langues se délient à l’issue du congrès des communes qui s’est tenu à Taravao. Durant ces rencontres, les maires avaient à répondre à cette question, "comment permettre aux communes d’être un atout au développement économique de la Polynésie française ?"
Même si tous les tāvana sont motivés à travailler pour le développement économique de leur commune, un petit bémol se fait tout de même sentir. "On demande à ce que le Pays et l’État nous associe à tous projets de développement parce que c’est important de mettre au centre du système, la famille et le citoyen polynésien. C’est avant tout, pour éviter les clivages et pour que le polynésien soit au cœur du développement", explique Félix Barsinas, maire de Tahuata, aux Marquises. Et de poursuivre, "nous ne sommes même pas consultés dans les projets que mène le Pays. On apprend par le biais des médias qu’un projet de grande envergure comme aquacole, ou le projet du Mahana Beach a été réfléchi en aparté dans des bureaux administratifs, sans pour autant associer les tāvana. Alors que c’est sur sa commune. Ce n’est pas dans une volonté de bloquer, mais d’associer et de faire des propositions".
Un discours, pourtant, qui n’est pas partagé par le tāvana de Bora Bora, Gaston Tong Sang : "je pense que cette époque est révolue. Le président Edouard Fritch, c’est un maire, et il a fait pratiquement toutes les communes. Il n’a pas ce problème de barrière politique. Il faut maintenant se tourner vers l’avenir. J’ai dit aux maires que ce n’était pas la peine de demander au Pays si on n’a rien à proposer."
Le partage des compétences était également au cœur des débats. Un sujet qui intéresse la plupart des maires.
"Dans le secteur de la pêche, on aimerait bien que ce soit nous et non des pêcheurs d’ailleurs. La culture marquisienne on en est fier parce qu’elle est vivante et dynamique. L’agriculture, l’aquaculture, l’artisanat aussi. Mais la règlementation freine tout ça. On s’inscrit dans une démarche participative avec le Pays. Ce n’est pas le transfert général des compétences que nous demandons, mais un transfert ciblé par rapport aux besoins", souligne Félix Barsinas.
À Hao, on parle beaucoup du projet aquacole, un dossier que défend le maire de cette commune, Théodore Tuahine. "Ma politique est de créer de l’activité sur l’atoll". Pour lui, ces questions de compétences ne sont pas sa priorité. "Quelle que soit la compétence que l’on récupère ou pas, on a toutes les compétences et on en assume pleinement".
Et Gaston Tong Sang va encore plus loin, "il ne faut pas rester bloqué sur ses acquis, ou sur cette idée de compétence ou pas. Quand on peut on le fait", explique-t-il, avant de rajouter. "Lorsque j’ai traité le problème de l’eau potable, tout de suite après, s’est posé la question, qu’il faut traiter les eaux usées sinon on va polluer le lagon. Je n’ai pas attendu qu’on me transfère les compétences, je l’ai fait en 1995. Les compétences ont été transférées en 2004, et ça marche tant mieux. Lorsqu’on pense que c’est utile pour ta commune et ta population, donc il faut le faire."
En terme de transfert des compétences, le ministre des finances et du budget, Teva Rohfritsch a donné quelques précisions. "Il faut faire attention car une question de transfert total, c’est définitif. Ensuite, c’est exclusif ça veut dire qu’une fois qu’on exerce une compétence il faut pouvoir la financer et avoir les conditions de l’exercer. A l’échelle d’une commune, on n’a pas les mêmes moyens qu’à l’échelle du Pays."
En clair, avoir les compétences, c’est bien mais encore faut-il être sûre d’avoir les moyens. "Il y a aussi par voie de convention, des possibilités qui nous sont offertes pour faire que les communes puissent être associées davantage au développement économique territorial", prévient le ministre.
Durant ce congrès, chacun a pu s’exprimer sans langue de bois. Ce jeudi, les tāvana ont pris une résolution où ils soulignent d’abord que les communes ont gagné "en maturité et en compétence dans la gestion des affaires de la Cité", que les élus sont "engagés avec leur conviction et leur courage" et reconnaissent "que des marges de progrès sont encore à réaliser dans nos compétences propres".